Est-il nécessaire de travailler avec une palette de couleurs limitée ?
Tout d’abord je souhaite rappeler que la pratique artistique est la une pratique libre, créative et innovante dans laquelle les choix, les décisions nous conduisent à un résultat final avec lequel le on se sent en harmonie. Cependant, les règles que l’on s’impose par choix, justement, nous permettent d’atteindre un objectif particulier que l’on se serrait fixé.
J’aime avoir un style spontané, c’est d’ailleurs l’un de thèmes principaux que j’explore en peinture. Mais cette façon de se lancer sur la toile m’a aussi conduit à des dérapages colorés.
Je m’explique : avant de commencer une session de peinture, j’ai souvent une idée des couleurs que je veux employer. Mais un mélange trop spontané au cours de la séance à vite fait d’éteindre ou de salir mes couleurs. Toute tentative de rectification alourdit automatiquement l’ensemble qui perd alors cette fraîcheur de la spontanéité que je cherche justement à explorer.
C’est pour éviter cette situation que j’ai commencé à travailler avec une palette limitée et déterminée à l’avance. La palette limitée, kesako?
Il s’agit d’établir, dès le départ, la série de couleurs avec laquelle on va travailler. Toutes les couleurs résultant du mélange des ces quelques tonalités de base viennent ajouter en nuances mais le dérapage n’est alors quasiment plus possible.
C’est d’ailleurs un outil intéressant pour construire une collection de peintures car, tout en offrant une infinité de nuances, elle assure une unité harmonieuse entre les différents éléments de la série. Pour en savoir plus sur la création d’une telle palette, voir mon billet « Harmonier les couleurs d’une série de peinture grâce à une palette limitée ».
Pour ma deuxième collection des Spontanéités, série de peintures abstraites, j’ai travaillé avec une palette de couleurs qui m’attiraient fortement. J’ai établi les recettes me permettant de recréer ces couleurs en quantité et me suis mise à peindre en expérimentant les mélanges, les contrastes qu’elles offraient entre elles.
Quelque soit la nature de l’exercice que j’entreprenais, les différences stylistiques ou autres, une harmonie colorée se dégageait de l’ensemble tout en assurant une forte individualité à chaque œuvre.
Les effets de la palette limitée :
Voici quelques exemple de palette très limitées. Pour chacune de ces palettes, j’ai sélectionné trois couleurs associées au blanc. En général, je bani le noir de la palette mais il peut aussi être intéressant de l’utiliser en remplacement du bleu. C’est un choix, comme les artistes en font constamment, au cours de leurs processus créatifs.
Une excellente base pour le choix initial est de sélectionner un jaune, un rouge et un bleu peu importe lesquels. Cette selection est basée sur une théorie de la couleur telle qu’établie au XIXe siècle avec l’utilisation des trois couleurs primaires qui par l’infinité de mélanges qu’elles permettent donnent la possibilité de créer toutes, je dis bien toutes les couleurs existantes.
Les trois couleurs primaires traditionnelles sont le Cyan pour le bleu, le Magenta pour le rouge (mais c’est en fait un rose très saturé), et le jaune primaire qui à une couleur très citronnée.
Voici le cercle chromatique de base résultant du mélange de ces trois couleurs, chaque couleur obtenue est éclaircie par une touche de blanc :
Cette palette est vibrante, acidulée et lumineuse.
De nos jours, il est fréquent de choisir de façon arbitraire les trois couleurs de base d’une palette. Voici quelques exemples de cercles chromatique développés à partir de trois couleurs autres que les couleurs primaires :
On voit clairement que le choix des couleurs initiales imprime une ambiance, une atmosphère colorée puissante.
Un bleu chaud ou froid affectera la nature et la luminosité des verts et des violets obtenus par mélange avec le jaune ou le rouge. Un bleu est chaud s’il contient ne serait-ce qu’une très légère touche de rouge ou de rose. La perception de la température des couleurs reste subjective et peu varier d’un individu à l’autre. Il est par exemple difficile de determiner la température du bleu outremer.
Il est intéressant de remplacer le bleu par du noir comme dans l’exemple ci dessous.
Le noir dans cette palette se comporte comme un bleu : associé au jaune, il crée du vert mais celui-ci tire au vert olive. Les couleurs sont en demi-tons, plus ternes ou terreuses. Cela donne une palette de tons plus neutres. Mais l’ensemble reste harmonieux tout en transmettant une atmosphère très dense, forte.
CONCLUSION :
En résumé, travailler avec une palette limitée permet de créer des atmosphères très personnelles et de pratiquer une utilisation sensible de la couleur. Chaque palette transmettant une atmosphère singulière. L’usage limité des couleurs de base permet aussi d’apporter une grande harmonie à l’ensemble. Cela permet d’aborder une séance de peinture très gestuelle en privilégiant les mélanges directement sur le support sans avoir à craindre le « dérapage coloré ».